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[INTERVIEW CROISEE] Eté chargé et double casquette

mercredi 1er juillet 2020
[INTERVIEW CROISEE] Eté chargé et double casquette

Qui sont ces personnes qui font l’Atelier Paysan ? Chaque mois, ils et elles se présentent ! Pour poursuivre cette série, Morgane Laurent (animatrice nationale) et Ilan Crequer (ingénieur R&D) prennent la parole pour nous parler de leur double casquette salarié-e-s sociétaires et de l’été qui vient. Une période pas si creuse en fait !


Que fais- tu à l’Atelier Paysan, quelles y sont tes missions ?

Ilan :
Je suis sur un poste technique en création depuis moins d’un an, qui accompagne certaines évolutions dans notre manière d’aborder la R&D. Jusqu’à présent, les techniciens de l’Atelier Paysan étaient sur des dizaines de tâches en parallèle, du dessin technique, de l’accompagnement de groupes, de la traque d’innovation paysanne en passant par la gestion de l’achat/revente ou bien évidemment l’activité de formation. Mon poste est en fait le pendant en « négatif », si on peut dire, de celui de Morgan (voir sa présentation ici), car je m’occupe plus spécifiquement de la CAO (Conception Assistée par Ordinateur), et d’une partie de prototypage. Évidemment, il y a des porosités entre tous ces champs de travail, et c’est bien ce qui est intéressant !
J’apprends énormément de choses, les temps en atelier sont pour moi précieux et indispensables pour appréhender les choix techniques auxquels je peux être confronté, éviter le hors sol de bureau d’études dans laquelle on a tendance à aller en tant qu’ingénieur.

Morgane :
J’occupe le poste d’animatrice nationale. Nationale pour rappeler l’échelle à laquelle nous travaillons qui est bien la France entière (métropolitaine et Outremers) et animatrice pour les liens étroits que j’entretiens avec les personnes et organisations qui gravitent autour de l’Atelier Paysan et/ou qui en font partie : les collègues salarié·e·s, les sociétaires, les essaims, les partenaires… A ce titre, je suis souvent la personne qui répond aux mails de prises de contacts et aux demandes d’interventions de l’Atelier Paysan dans des salons et des évènements. Je suis aussi pas mal impliquée sur l’activité formation, notamment en cette période de construction du calendrier de la saison prochaine car de nombreuses formations sont organisées avec des partenaires comme des ADEARs, des CIVAMs, des GABs, etc. Et puis dire enfin que j’anime et coordonne, en lien avec Marie une des co-gérantes de l’Atelier Paysan, la MCDR UsageR-E-s. C’est un programme multi partenarial sur l’innovation par les usagers et usagères avec tout plein de questions intéressantes dedans comme le rapport des paysannes à la technique et aux machines agricoles, l’autoconstruction pour des paysan·ne·s en difficultés et les reprises de fermes sous forme de restructuration.

Vous êtes tout·e·s deux salarié·e·s sociétaires, pourquoi cet engagement ?

Ilan :
Pour moi c’est une conception du travail et de structuration de la production. Quand on sort d’école d’ingénieur comme moi, on a très bien intériorisé le rôle que l’on a, qu’on peut résumer par celui de « petit·e soldat·e de l’industrie ». Le but de notre corps de métier est avant tout d’apporter des solutions techniques aux exigences du marché ou de l’actionnariat, et c’est d’ailleurs formulé ainsi durant notre formation. Les questions de ce que nous fabriquons, comment nous produisons et pourquoi nous le faisons ne sont pas envisageables, totalement hors du radar. A mon sens c’est l’une des origines de la « perte de sens » qui assez uniformément ressentie par les étudiant·e·s et jeunes diplômé·e·s, que je qualifie plutôt d’aliénation, au sens d’une dépossession du produit de son travail.
Par la coopérative, on sort en grande partie de ces problèmes en replaçant ces questions politiques au centre de notre production, et on le fait en particulier grâce au sociétariat. La double-casquette nous donne une parole politique au sein de la structure à l’occasion des Assemblées Générales, parole qui se sépare de notre qualité de salarié, et je pense que c’est une manière d’envisager la production d’une manière plus démocratique, par exemple pour pouvoir réellement répondre aux enjeux écologiques. Ce qui, en plus de ça, rend le sociétariat intéressant à l’AP, c’est la constitution en collèges et la capacité qu’ont les usager·e·s paysan·ne·s à décider de la direction de la coopérative, avec un intérêt collectif qui s’y matérialise très concrètement.

Morgane :
Je viens plutôt du milieu associatif et la culture coopérative m’était globalement assez inconnue avant d’arriver à l’Atelier Paysan l’année dernière. Mais cela m’intéressait beaucoup et quitte à travailler dans une coopérative, je me suis dit que c’était l’occasion d’y aller carrément. Après 6 premiers mois de réflexion et d’atterrissage dans la structure, j’ai décidé de devenir sociétaire à l’assemblée générale de décembre 2019. Je partage ce que dit Ilan sur le fait d’avoir plus voix au chapitre au sein de la structure, pour les décisions importantes prises en Assemblée Générale. En rendez-vous avec des partenaires également, je vais me sentir d’autant plus légitime à aller sur des terrains politiques que je suis sociétaire. Donc voilà, je suis très heureuse d’expérimenter ce que peut être une coopérative via cette casquette de salariée sociétaire. Et la première journée de formation sur l’histoire et les perspectives de l’Atelier Paysan (et plus généralement du mouvement coopératif) organisée en mars dernier a été super intéressante et riche. Je recommande !

L’été, période creuse pour l’AP et pour vous ?

Ilan :
Pas tant ! Ce ne sont juste plus exactement les mêmes logiques à l’œuvre, mais il y a du travail. Je dirais, du peu de recul que j’ai au sein de la structure, que l’hiver permet des contacts plus étroits avec les paysans et donc de l’avancée sur les retours de terrain, tandis que l’été est un temps où l’on peut développer ce qui a été collecté pendant la saison hivernale. Notre plateforme logistique reste également ouverte, puisqu’on estime qu’il faut pouvoir soutenir l’activité chargée des paysan·nes durant cette période estivale. C’est une saison où l’on doit pouvoir fournir notre soutien technique ou logistique, et on s’y prépare ! Ça sera notamment pour moi l’occasion d’être plus au contact des demandes quotidiennes venant des usager·e·s de notre structure, notamment par la montée des demandes de kits d’outils.

Morgane :
Et bien pas tant non plus, voire pas du tout en fait ! Je vais être encore bien prise dans les semaines à venir sur les formations et notamment le lancement en septembre en Bretagne de la première formation de plusieurs semaines destinée aux porteurs et porteuses de projet agricoles.
Et puis traditionnellement, la fin d’été et l’automne sont des périodes de fêtes paysannes et évènements sur lesquels sont souvent invité·e·s des sociétaires de l’Atelier Paysan. Il y a un boulot de préparation et de réponses aux propositions, même si cela risque d’être plus calme cette année avec le COVID. Et puis enfin des échéances qui se rapprochent pour la dernière année du projet Usager-e-s. Le travail ne manquera pas donc pas et la pause bretonne pour faire le stock d’air marin fera du bien !