Accueil > Actualités > Parc de démonstration d’outils : de nouveaux défis à relever

Parc de démonstration d’outils : de nouveaux défis à relever

mercredi 23 juillet 2025
Parc de démonstration d’outils : de nouveaux défis à relever

Les parcs de démonstration d’outils maraîchers autoconstruits (projet Outildem) visent initialement à faciliter la mise en œuvre et la diffusion des pratiques d’agriculture écologique par le test et le prêt d’outils dans les fermes.

Il a désormais aussi comme raison d’être l’exploration de solutions techniques dans des territoires aux conditions a priori peu propices au maraîchage, où des paysans courageux, souvent contraints par le manque d’accès au foncier dans des secteurs plus favorables, cherchent à réussir à produire des légumes pour les citoyens qui les entourent.

Tour de France des parcs de démonstrations existants et à venir...

Saint-Antonin, dans les Alpes-Maritimes...

C’est là, sur le haut d’une colline aux sols hétérogènes, que Renaud et Maeva sont installés depuis 5 ans. Ils ont planté de nombreux arbres fruitiers, installé plusieurs poulaillers qui abritent leurs poules pondeuses et cultivent des légumes en agriculture biologique. Renaud connaît l’Atelier Paysan, il a construit un semoir maraîcher en formation, une lame souleveuse et récupère pas mal d’outils pour adapter les siens. Contacté par la Manufacture Paysanne en début d’année 2025 dans le cadre du travail d’essaimage et du projet de parc de démonstration Outildem, Renaud a répondu favorablement à l’idée d’aller plus loin dans la stratégie de préparation des sols en planches permanentes, qu’il réalisait jusque là par un enchainement standard d’un décompacteur à dents droites et rigides suivi d’un travail au rotavator.

Courant juin 2025, le tryptique du travail en planches permanentes était livré sur sa ferme : butteuse, cultibutte, et vibroplanche. C’est tard pour la saison maraîchère, mais Renaud a débuté quelques tests, sur des planches qu’il a semées de carottes. Début juillet, le rendez-vous était pris avec la Manufacture Paysanne et l’Atelier Paysan, qui assurent ensemble l’accompagnement des maraîchers bénéficiaires d’un d’outil de prêt dans le département.

JPEG - 6.3 Mio Premiers passages de butteuse chez Renaud

Et s’agissant du tryptique, le temps de prise en main et de familiarisation n’est pas à négliger : les réglages sont multiples, la combinaison d’usage des différents outils aussi. En fonction de l’état du sol initial, de sa nature, de la préparation visée, chaque outil peut être utilisé avec des réglages adaptés. Renaud aura du temps pour l’appropriation, après le gros des récoltes cet automne et en 2026. Pour l’heure, c’est avec la butteuse que la transmission a débuté concrètement, par la préparation de planches destinées à accueillir des engrais verts avant des cultures d’automne :

  • Renaud a d’abord passé un broyeur sur la végétation spontanée qui s’était installée ce printemps.
  • Puis progressivement, il a formé les buttes à la butteuse, d’abord lentement au premier passage avec l’outil très incliné vers l’avant, puis à vitesse un peu plus rapide au deuxième voire troisième passage en ramenant l’outil en position horizontale. Une première étape indispensable, menée prudemment pour tirer des planches bien rectilignes et s’éviter des corrections de trajectoires compliquées par la suite…
  • ... qu’il assurera en autonomie, par un éventuel nouveau passage de la butteuse, puis avec le cultibutte et éventuellement le vibroplanche en fonction de la qualité de préparation désirée.
Plus au Nord, dans les Hautes-Alpes...

Plus au Nord, nous faisons étape chez Boris Monnier, à Rosans dans les Hautes-Alpes. Ce secteur des Baronnies est plus une terre d’élevage de moutons que de maraîchage. Boris conjugue les deux sur sa ferme qu’il mène avec sa compagne Aurélie. Ils cultivent aussi des céréales.

Son cheminement agronomique, dans des sols argilo-calcaires très compliqués, l’a amené à tester des solutions de travail du sol différentes des pratiques locales traditionnelles - labour automnal puis reprise de sol en sortie d’hiver et rotavator.

Depuis 8 ans, il utilise des outils de travail du sol en planches permanentes. Ses sols ne lui facilitent pas la tâche : quand les mottes sèchent en surface, l’horizon du dessous reste toujours humide et plastique, obligeant à répéter les passages d’outils, pour faire ressortir des mottes plus grosses et denses, les laisser s’assécher, mais pas trop, avant de repasser un outil pour parvenir à réduire petit à petit leur taille. Et quand le sol est trop sec en surface, ce pilotage s’accompagne d’arrosages ciblés, destinés à offrir le niveau de ressuyage optimal.

Equipé d’un cultibutte et d’un vibroplanche, Boris a fait évoluer ces deux outils : en équipant le vibroplanche de roulémiettes d’une part, et en remplaçant les dents de son cultibutte par des étoiles de bêches roulantes d’autre part. Satisfait de ce dernier test et pour limiter les changements de dents sur son cultibutte, Boris a finalement récupéré ce printemps le prototype de bêches roulantes construit il y a quelques années à l’Atelier Paysan.

JPEG - 2.3 Mio
Boris teste les bêches roulantes dans son sol des Baronnies

Boris participe à un GIEE tout frais consacré à la réduction du travail du sol en conditions difficiles des Baronnies. Lui et d’autres maraîchers de son secteur sont accompagnés techniquement par Agribiodrôme, pour partager leurs besoins et explorations. Leurs réflexions pourraient conduire à tester d’autres outils et combinaisons, possiblement dans le cadre du parc de démonstration Outildem.

Direction le Sud-Ouest, dans les Landes

Traversée de la France, arrivée dans les Landes. Après labarre-porte-outiléquipée d’étoiles de binage avec guidage prêtée à la ferme de Chaoulo ce printemps, c’est dans ce département qu’un autre tryptique de prêt devrait être acheminé en fin d’été 2025.

D’abord sur une ferme maraîchère, puis il devrait migrer à l’Airial du Tastot, sur la commune de Pontenx-les-Forges. C’est ici que le tiers-lieux rural La Smalah porte un vaste projet d’espace agricole, lieu et projet à la fois pédagogique, de démonstration et de test. Un contexte idéal pour mettre en vitrine l’autoconstruction d’outils pour le maraîchage et l’autonomie qu’elle apporte aux fermes. Un contexte de sol certes plus facile – on est sur des sables – mais néanmoins fragile, qui requiert une attention différente mais vitale pour pérenniser le potentiel de fertilité sans gaspillage d’intrants.

JPEG - 2.9 Mio
L’Airial du Tastot, futur espace agricole dans les Landes

Retour dans les Alpes-Maritimes

Bouclons ce tour d’horizon, en retournant dans les Alpes Maritimes, et allons au bout du fil conducteur de cet article autour des outils autoconstruits prêtés dans le cadre du projet Outildem.

D’autres défis nous attendent là : équiper les fermes maraîchères de petite taille, installées où elles le peuvent, parfois en plaine mais aussi parfois dans les collines de l’arrière-pays niçois, repoussées par l’urbanisation dans les restanques traditionnelles moins accessibles et surtout peu mécanisables.

La Manufacture Paysanne a arpenté le secteur depuis 2024 à la rencontre des maraîchers, afin de comprendre leurs besoins et difficultés, en lien avec les outils de travail. Une dynamique en est née, pour tester différents petits outils du catalogue maraîchage, en les construisant ensemble au préalable pour monter en compétences : la construction a démarré cette fin de printemps avec le rouleau perceur et des cloches pour perçage thermique de bâches. A partir de l’automne, suivront un lit de désherbage, une enrouleuse de bâches, un chariot porte-tout et des brouettes maraîchères, une récolteuse à doryphores, une lame souleveuse pour les récoltes.

JPEG - 422.9 kio

Rouleau perceur, premier outil construit par le groupe des Alpes-Maritimes