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[COOPÉRATIVE] Retour sur la première résidence

jeudi 28 mars 2019
[COOPÉRATIVE] Retour sur la première résidence

Le mois dernier, on vous parlait du concept de “Résidence à la ferme”, une des nouvelles formes d’intervention possibles pour gagner en autonomie et organiser des formations d’autoconstruction, ouvertes à un public non-agricole. Retour sur un premier exemple pour nourrir nos imaginaires...


Petit rappel : qu’est-ce qu’une Résidence ?

Cliquez-ici pour lire le récapitulatif du principe de Résidence

Si vous avez suivi les actualités de la coopérative, le concept de "Résidence à la ferme" ne doit pas vous être inconnu... en effet, il s’agit de cette nouvelle forme d’intervention pour les formations à l’autoconstruction paysanne, basée sur son ouverture à un public non-agricole. À la différence d’une formation financée par le VIVÉA, ce format de stage permet d’intégrer dans les sessions de travaux pratiques des personnes qui ne sont généralement pas éligibles à ce même fonds de formation. Ce faisant, il devient possible d’ouvrir la transmission de savoir-faire paysans à un nouveau public, en la centrant autour de la “communauté” accueillant la formation. Du point de vue paysan, le stage reste une occasion de se former en construisant ses outils, tout en faisant monter en compétence les impliqué·e·s (ou potentiel·le·s) de sa ferme : par exemple ses proches, le voisinage, des sympathisant·e·s, des amapien·ne·s, des professionnel·le·s de la région... autant de personnes-ressources formées aux savoir-faire essentiels dans le quotidien d’une ferme, sur lesquelles s’appuyer en cas de besoin. Du point de vue de ce "nouveau" public, il devient possible de se former aux techniques d’autoconstruction du métal et/ou du bois, tout en participant activement à la vie de la ferme. Par la suite (et en forçant le trait), organiser un chantier d’autoconstruction chez soi deviendrait aussi simple que de programmer une journée de ramassage de carottes avec son entourage... une solution de plus à ajouter aux possibilités d’implication !

Sur le plan financier, l’autofinancement de ces formations par les paysan·ne·s est une solution. D’autres pistes sont possibles : il faut par exemple creuser du côté des aides publiques aux investissements ou de la DJA. Une campagne de financement participatif peut aussi être une solution pour rassembler une partie de la somme nécessaire à la tenue du stage, tout comme la planification de petits emprunts. Il est aussi possible de demander une participation financière, plus ou moins symbolique, aux personnes qui se forment. Autant de briques mises bout-à-bout qui permettent de construire le financement nécessaire à la formation. Toutes ces pistes restent à creuser par chaque paysan·ne afin de construire son projet de résidence et mobiliser son entourage !

Comparaison des modèles de formation “VIVÉA” et “Résidence” (plus d’infos à la suite) :

Le tableau ci-dessus propose une comparaison de ces 2 modèles de formation. La formation VIVÉA permet avant tout la transmission de savoir-faire à une pluralité de paysan·ne·s, de fermes. Dans ce cas les supports de formation fabriqués (outils) partent dans ces fermes à la fin du stage. La résidence, elle, est centrée sur une seule ferme et la montée en compétences des personnes composant sa communauté, alors que les supports de formation sont réalisés à destination de cette même ferme. Dans un contexte d’installation notamment, la résidence peut donc s’avérer assez intéressante pour à la fois s’équiper et, dans le même temps, constituer ou consolider une communauté solidaire autour de son projet de ferme.

Nous explorerons ce nouveau type de formation au fil des prochains mois et construirons avec les paysan·ne·s intéressé·e·s pour proposer des sessions adaptées à leurs situations.


Le premier exemple de résidence en mars 2019 !

Par la force des choses, l’occasion d’expérimenter ce concept pour la première fois s’est présentée quelques semaines après l’annonce de février : sur la ferme de Quimerc’h dans le Finistère (29). Ceci à l’occasion d’un chantier d’autoconstruction en bois rond chez Marie et Vincent, paysans-herboristes pour réaliser un hangar de stockage de matériel. Vincent, c’est aussi notre ancien collègue ingénieur-formateur à l’Atelier Paysan, par ailleurs toujours paysan-référent dans le Grand-Ouest.

Prenons donc quelques instants pour nous arrêter sur cet inédit de "résidence à la ferme", qui marque le début d’une exploration et pourra sûrement révéler d’autres pistes d’interventions. Alors qu’il s’annonçait, sur le plan logistique, comme stage plutôt "classique" comparé aux formations sur la charpente proposées par l’Atelier Paysan, c’est son contexte d’organisation qui a en partie changé la donne. L’autofinancement de la formation par les paysan·ne·s a permis d’ouvrir la session à un public non-paysan, notamment composé de professionnels intéressés par les techniques de chantier, rassemblant une douzaine de personnes avec un bon niveau de bricole dès le départ ! Avec l’accompagnement de deux formateurs de l’Atelier Paysan, la structure du hangar de 128 m² a pu être assemblée et montée avec succès en 5 jours de chantier, laissant même le temps pour réaliser une partie du bardage du bâtiment.


Un aperçu, en graphique, des différents publics de cette formation :

Témoignage de Vincent :

Voici quelques mots de Vincent, premier paysan installé à expérimenter la résidence, pour nous partager son ressenti sur ce concept émergent. Merci à lui d’avoir pris le temps de ce retour !

« Cette formation en “mode Résidence” avait un aspect vraiment intéressant par rapport aux formations habituelles du fait de la diversité d’horizons des participants, qui, chacun à leur manière, nous faisaient profiter de leurs compétences. Ce format permet également une souplesse quant à la présence des participants, cela ne pose pas forcément de problème si un stagiaire ne peut pas participer à l’intégralité de la formation. J’avoue que j’étais sceptique à propos de cette idée de "résidence" sur la capacité des paysans à financer la prestation. Ce chantier m’a fait évoluer sur cette question : je pense qu’il faut être acteur de ce financement. En demandant une participation, même minime, à tous les stagiaires, cela peut représenter une partie non négligeable du montant. il y aurait la possibilité de s’appuyer sur son Amap pour les impliquer sur le chantier et pourquoi pas financièrement. Un petit financement participatif pour couronner le tout et l’affaire est réglée. Toutes ces petites choses peuvent contribuer à réduire la facture tout en créant du lien et de l’animation autour de sa ferme. Et le résultat est là : une formation qui a permis à une quinzaine de personnes de s’autonomiser sur la construction de charpentes à la tronçonneuse, certaines d’entre elles habitent dans les environs et il est probable que nous organisions de nouveaux chantiers collectifs sur leurs fermes ou sur la mienne et je me retrouve avec une magnifique charpente, fabriquée collectivement, dans une superbe ambiance ! »



Journal de bord de la Résidence

Consultez ici le “carnet de bord” de ce stage, tenu par Arthur, formateur et référent sur l’architecture paysanne libre à l’Atelier Paysan.

Lundi

8h30, tous les participants ont rejoint la ferme de Quimerc’h. Une petite douzaine de paysans, boulangers, maraîchers, élagueurs ou autoconstructeur et autoconstructrices d’un jour ont été réunis par Vincent et Marie, les paysan-herboristes qui ont sollicité une résidence de l’Atelier Paysan. Après un tour de table et un café, nous visitons le chantier avec le groupe. Les troncs sont étalés, le bois scié est arrivé, les plots bien alignés. La préparation de la résidence s’est faite en étroite collaboration entre la ferme et l’Atelier, plusieurs mois auparavant.

Retour au fournil, qui nous servira toute la semaine de point de ralliement tant pour les points théoriques que les repas partagés. On déroule les plans, l’épure est tracée au tableau et l’on s’assure de ne perdre personne. Tout le monde a une tâche pour préparer les mille petites choses à faire avant d’attaquer la taille de la charpente proprement dite. On s’exerce à la tronçonneuse en taillant des rondelles, on déplace ce tas de bois, on sort un établi. En fin de journée, deux zones de travail ont été organisées, pour quatre petites équipes au total.


Mardi

On profite du petit-déjeuner pour parler des différents assemblages utilisés pour ce chantier. Chacun échange au chaud sur les tours de mains appris la veille, puis l’on retrouve nos bouts de bois. Les deux premiers portiques sont achevés en début d’après-midi. On s’organise pour déplacer à la force collective leurs 650 kg respectifs et embrayer sur les suivants. La méthode est claire, le groupe se l’approprie petit à petit. Des trinômes soudés se sont formés naturellement et tou·te·s se corrigent mutuellement. Les formateurs de l’Atelier passent de groupe en groupe et laissent faire. La journée est ponctuée de petits grains qui font le charme de la région. Le levage est pour demain ! Il faut anticiper les autres pièces nécessaires : pannes, échantignolles, en bois sciés. Une opération à la scie circulaire pour changer un peu de la tronçonneuse. La fin d’après-midi est consacrée à l’affûtage des chaînes : point théorique puis tout le monde à sa “queue-de-rat” (lime) !


Mercredi

Les tronçonneuses sont fraîchement affûtées, et nous avons quatre fermes par terre. La pelle mécanique du voisin est arrivée, mais un point théorique s’impose : on termine le café à discuter levage, élingues, sécurité et contreventement structurel. Il s’agit de ne rien avoir à relever ! On lève la première ferme : c’est haut ! Le volume du futur hangar se dessine. C’est l’émotion ! Du tas de bois de lundi, une énergie collective a érigé ce bout de charpente parti pour rester là-haut un bout de siècle. La dernière ferme est taillée en autonomie par les stagiaires, qui ont atteint une bonne vitesse de croisière. Les trois premières sont debout en fin de journée, stabilisées entre elles par les plus à l’aise en hauteur. On redescend sur terre avec un échange collectif en début de soirée sur le budget du projet. Une grosse addition, une petite division, et on arrive à 85 EUR HT du m², 1/2 bardé et couvert en bac acier. C’est aussi le moment pour les participants d’exposer leurs projets d’auto construction, et nous trouvons des solutions constructives ensembles.


Jeudi

Le processus est rôdé pour tout le monde et chacun·e à trouvé sa place. Cette quatrième journée est l’occasion de faire tourner les postes pour que tout le monde expérimente l’ensemble des gestes et des postures. Les deux élagueur grimpeurs présents glissent de précieux conseils et font tourner les baudriers. Le levage des deux dernières fermes est une formalité. Le bardage de la face nord est également presque terminé, merci le cloueur à gaz ! La journée se termine à la mer.


Vendredi

Le portique ouest se voit réserver un traitement spécial : il doit être bardé. On dresse un poteau central, quelques lisses sont délignées à la volée et l’emplacement de l’encadrement de porte est décidé en live par Vincent de la ferme.
Nous nous réunissons une dernière fois dans le fournil pour faire le bilan de la semaine, tant constructivement qu’humainement et pédagogiquement. Il reste à Vincent le bardage ouest, les tôles et la serre à plants au sud.


Consultez l’album photos de la formation sur Flickr :

[Résidence] Chantier charpente en bois rond - Ferme de Quimerc'h


Envie de creuser sur le sujet ?

Le sujet vous parle ? Vous interroge ?
N’hésitez pas consulter la page spécialement consacrée aux résidences pour vous faire votre propre avis sur la question : https://www.latelierpaysan.org/Investissez-dans-votre-autonomie-offrez-vous-une-residence-a-la-ferme

Si vous avez des questions sur ce tout nouveau principe de résidences, des remarques, des critiques, des ajustements… vos retours sont les bienvenus ! Ce format d’intervention est encore en cours d’élaboration, vos commentaires nous permettront donc de le construire avec vous !

Pour nous contacter :

Tél : 04.76.65.85.98
Mail : contact@latelierpaysan.org



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